posté le 25-03-2021 à 10:35:38

Marina (1).

 

 

 

Le temps qui passe est une verrue qui gonfle et qui éclate parfois. Alors on peut s’attendre à tout avec elle. On risque de recevoir sur le visage, du pus, du sang ou tout autre ingrédient malodorant et peu ragoûtant ou parfois, mais très rarement de la gelée royale parfumée.

Mais à quoi peut-on s’attendre quand le temps éclate ?

Quand on s’ennuie par exemple, le temps gonfle et les secondes deviennent des minutes et les minutes des heures…Et lorsqu’on attend un appel téléphonique de sa bien-aimée, le temps flirte avec des heures, des mois et même des années.

Et puis je l’ai rencontrée...

Moi, plus gris que la grande Muraille de Chine, anonyme parmi les anonymes, aussi gai qu’un oiseau inséparable ayant perdu sa moitié, je roulais en voiture sur une route bien triste et presque déserte.

Le temps était alors bien codifié, enfermé, sans espoir de sortir, dans le boitier métallique de ma montre fixée à mon poignet gauche. J’avais trop serré le bracelet et ça me faisait mal. Ma voiture connaissait le trajet par cœur ; je lui faisais confiance. Mais je n’aurais pas dû…

 

        A suivre

 

 


 
 
posté le 27-03-2021 à 07:12:37

Marina (2).

 

 

 

Ma voiture avait oublié qu’il fallait parfois freiner. Comme moi, souffrait-elle, elle aussi, d’insomnie? Je pensais que chaque nuit, elle dormait tranquillement dans son garage. Je commençais à avoir des doutes sur ses fréquentations nocturnes. En tout cas, ce jour-là, elle ne freina pas ou du moins elle freina avec une nonchalance indigne d’une voiture italienne, une Alfa-Roméo en l’occurrence.

Bon, le plus grave, c’est qu’à ce moment-là, une jeune femme eut l’idée saugrenue de traverser la chaussée. Le choc fut inévitable ! C'est vrai, j’exagère un peu. Disons, que mon rétroviseur droit la frôla, ce qui, je ne sais par quel mystère de la physique, la fit tomber par terre. Pessimiste comme j’étais, je la voyais déjà morte et moi en prison. Je garais ma voiture sur le bas-côté et comme un véritable chien Saint-Bernard citadin, je me précipitais vers elle, allongée sur le dos. Oh, qu’elle était jolie ! Sa robe, déjà courte, était retroussée et je ne pus qu’admirer ses jolies cuisses et plus haut un soupçon de string ficelle noir. Mais en était-ce un ? Car elle était vraiment brune cette jolie fille…

Mon cerveau avait pris ses quartiers d’été, comme quand on est tout excité à cause du soleil. « Bon je fais quoi maintenant ? », me dis-je comme un aboulique* incapable de prendre une décision. « Je l’embrasse ? Heu, je lui fais un bouche-à-bouche bien baveux ? J'effectue un massage cardiaque ? » C’est vrai qu’elle avait des seins qui devaient frôler le 95B…

Mais je m’aperçus vite que tout cela n’était pas raisonnable… Soudain, elle ouvrit les yeux et me sourit. Ce sourire-là est resté gravé dans ma mémoire pendant des années…

 

A suivre…

 

* L'aboulie traduit la diminution, l'insuffisance voire la disparition de la volonté et le sujet éprouve des difficultés à mettre en œuvre toute action. Malgré le ralentissement de son activité, la fonction intellectuelle n'est pas atteinte. Par contre, l'inhibition qui caractérise cette "maladie" diminue la dimension affective de la personnalité, qui garde cependant toute sa lucidité.

 


 
 
posté le 29-03-2021 à 10:07:17

Marina (3).

 

 

 

Elle était debout maintenant, apparemment sans dommages.

Moi, j’étais plutôt inquiet ; comme toujours j’envisageais le pire.

Cent fois, je lui posais la même question « mais ça va ? Ça va ? ». Et invariablement, elle me répondait « mais oui, mais oui ! ». Elle me dit qu’elle était assez pressée et je voyais qu’elle voulait rompre le contact. Moi, je n’en avais pas envie.

Elle était si belle, je me sentais minable à côté d’elle. Comment faire pour la retenir encore un peu ? Je lui proposais de lui donner mon numéro de téléphone. Elle me regarda, étonnée et prononça une phrase qui me fit mal : « mais pour quoi faire ? ». Elle voulait m’oublier au plus vite, c’est sûr ! Mon cerveau, véritable steak haché de chez Mac-Do, essayait de trouver un prétexte. « On ne sait jamais… » dis-je, en attendant une meilleure idée.

Je la voyais lasse et presqu’irritée. Elle devait me prendre pour un dragueur à deux balles, malhabile comme un escargot acnéique… J’insistais et pourtant ce n’est pas mon genre, moi, qu’on surnommait « l’abandonneur velléitaire ». Je trouvais une autre idée qui me sembla digne d’Albert Einstein : « vous savez, on ne sait jamais, vous pourriez avoir des séquelles de ce choc. Alors appelez-moi si vous avez un problème quelconque, même indépendant de cet accident ».

Elle me toisa presqu’avec mépris et je crus lire dans ses pensées « mais qu’est-ce qu’il a à me coller ce petit con ! ». Elle prit, quand même, le morceau de papier sur lequel j’avais noté mon numéro. Elle me tourna le dos et s’éloigna en remuant les fesses. Dans ma grande naïveté, je crus que c’était pour moi…

A partir de ce moment-là, j’attendis tous les jours son coup de téléphone…

 

A suivre

 

 


 
 
posté le 30-03-2021 à 13:15:22

Marina (4).

 

 

 

 

 

Cet accident a eu lieu il y a quelque temps déjà et depuis ce jour, j’y ai toujours pensé. Cette fille-là, je ne connaissais même pas son prénom. Mais sa beauté m’a impressionné et il se dégageait d’elle comme une vapeur invisible qu’on ressentait quand même, des ondes qui oscillaient jusqu’au cerveau.

Le lendemain, je me demandais comment je pouvais entrer en contact avec elle. La seule chose que je pouvais faire, c’était de retourner dans la rue où eut lieu « l’accident ». Je me disais qu’elle devrait bien repasser par-là, que son itinéraire familier pour se rendre sur son lieu  de travail ou d’études, devait obligatoirement couper cette rue. Alors je garais ma voiture dès le matin un peu à l’écart, en ayant une vue panoramique sur l’endroit de la furtive rencontre. Et j’attendais. Le temps ne passait pas, il semblait se gonfler comme un ballon de baudruche made in China. Pour essayer de contenir cette dilatation des heures, j’écrivais.

 

La houle du temps.

 

 

Mais qu’est-il devenu,

 Le sourire  joli

 De la fille éclipsée,

 Par ma mélancolie ?

 

 Le temps a bourgeonné.

 Les senteurs éphémères,

 Des fleurs abandonnées,

 Parfument les chaumières.

 

Sa bouche est tout un monde,

 Ses yeux sont un mystère,

 Ses dents sont une ronde

 Son souffle, une poussière.

 

 Le temps est un ballon,

 Qui gonfle et gonfle encore

 Un très vieux  galion,

 Que la houle dévore.


 

 

                                                                                    A suivre ....  

 

 

 


 
 
posté le 01-04-2021 à 06:46:58

Marina (5).

 

 Une semaine plus tard, j’en étais au même point : je n’avais pas vu la fille que je recherchais.

La lassitude est un somnifère très efficace ; je me suis souvent endormi en attendant ce mirage qui n’apparaissait pas.

A partir du 27 Octobre, c’était un vendredi, je me suis mis à attendre son appel téléphonique. Malheureusement, j’avais donné à la fille le numéro de mon poste fixe. J’avais un répondeur, oui, mais je sais que les gens n’aiment pas trop y laisser des messages. Ce qui fait que je me cloîtrais chez moi dans l’attente de son appel. C’était déraisonnable, je le sais. Quelle était donc la probabilité pour qu’elle m’appelât ? Quasi nulle. Mille fois plus faible, en tout cas, que celle de gagner le gros lot au loto. D’abord, elle devait se souvenir de moi, ensuite, il fallait qu’elle eût la volonté de me revoir. Et pour quelle raison mon Dieu ? J’étais si beau, qu’elle était restée en pâmoison devant moi ? Non, disons que j’étais aussi quelconque qu’un bison au sein de son troupeau dans la Pampa de Patagonie. Ou peut-être qu’était apparue une douleur quelconque suite à l’accident ? Plus le temps passait et plus cette douleur devenait aussi illusoire que la décrue du chômage en France. Mes espoirs n’étaient que des planches vermoulues d’un radeau qui flottait tant bien que mal dans un océan déchaîné. Quoi de plus déstabilisant que de voir s’évanouir ses dernières illusions ?

Je me levais à cinq heures précises, le matin et après mon petit déjeuné et ma toilette, je m’asseyais près du téléphone et j’attendais. Je n’allumais pas la radio de crainte que son son (tiens, tiens…) ne couvrît la sonnerie du téléphone, que j’avais réglée au maximum. Les heures passaient ainsi. Je lisais un peu et je faisais des mots croisés niveau quatre étoiles. De temps en temps, un appel me faisait sursauter. C’était souvent de la publicité, du genre « seriez-vous intéressé par les portemanteaux Solido, l’ami de nos manteaux ? ». Au début, je déclinais l’offre poliment, mais ensuite, craignant que ces appels n’encombrassent trop ma ligne, je raccrochais brutalement sans dire un mot.

J’en avais assez des portemanteaux Solido, des fenêtres inviolables et des canapés ultra-confort…      

Le temps qui ne passait pas, m’enveloppait dans une bulle qui grossissait au fil des jours…

A suivre

 

 


Commentaires

 

1. Fée   le 02-06-2021 à 10:53:38

Ah les appels casses bonbons à t'en faire des caries !
Une fois j'en ai eu marre, et un monsieur de chez Energie Directe me demanda quelle était mon fournisseur ,je lui ai dit que j' avais un élevage de hamsters qui pédalaient à la cave, et surpris il insista " non mais je suis téléconseiller d'Énergie Directe!" Alors je lui ai expliqué que depuis le Corona j avais plus d'énergie , plus de jus à rien " , que s'il pouvait m envoyer l énergie nécessaire pour que je sorte de cette dépression anti démocratique ça serait super reboostant, mais je ne sais pas pourquoi pas il a raccroché.
Alorsj'ai allumé des bougies, j'aime bien les ombres chinoises ...

Très sympas tes histoires à toi, hâte de lire la suite ...

 
 
 
posté le 02-04-2021 à 11:37:16

Marina (6).

 

 

 

L’attente, ce poison qui s’éternise.

L’attente, on ne sait pas quand elle finira.

L’attente qui, non seulement angoisse, mais aussi qui atteint notre cerveau, notre estomac, notre ventre et notre cœur.

Le cœur qui semble battre la mesure des heures qui ne passent pas. Alors il s’affole, se dilate, s’enraye en des palpitations aléatoires. L’attente qui ne dépend pas de notre volonté, qui fait de nous des êtres passifs, des larves qui se décomposent.

Alors en attendant son appel, j’écoutais en sourdine, une chanson de Charles Trenet des années 40 : « Que reste-t-il de nos amours ». Pour moi, dès le départ, il ne restait rien, car cet amour-là était une histoire qui n’avait pas encore commencé.

De temps en temps, quelques bouffées d’angoisse me submergeaient, des vagues qui étouffent, de l’eau qui monte et qui monte encore… Alors vite, ma bouée, mon radeau disloqué, je m’y accrochais avec ma plume et j’écrivais des poèmes sans réfléchir, une écriture automatique, presque psychanalytique…

 


Les couleurs,

De l’Automne,

Des lueurs,

Qui m’étonnent.

-------

Ton sourire,

Retenu,

Comme ton rire,

Disparu.

-----

Le temps court

Et s’épuise,

Les longs jours,

S’éternisent.

-----

Les stupeurs,

De l’hiver,

Sont des heures,

A l’envers.

A suivre

 

 


 
 
posté le 04-04-2021 à 18:16:54

Marina (7).


 

 

 

 

    Pourtant mon téléphone était ultra-moderne...

 


J’étais professeur certifié de sciences physiques et j’avais pris une année sabbatique pour préparer l’agrégation de chimie. Histoire d’enseigner quinze heures au lieu de dix-huit et d’avoir un meilleur salaire. Je devais faire de fréquents déplacements à Nice pour assister à quelques cours à la fac des sciences et effectuer des travaux pratiques. Tout ça en théorie, mais tout fut chamboulé à cause de ce funeste « accident ».

 

Comment quitter mon appartement ? J’attendais toujours ce coup de téléphone qui n’arrivait pas, mais j’espérais encore et encore ; je croyais au Père Noël et même aux miracles à cette époque. Il fallait bien me nourrir et comment m’absenter de chez moi le moins possible ? J’effectuais mes courses deux fois par semaine dans une grande surface dès huit heures trente en espérant que cette fille se réveillait tard.

 

En revenant à la maison, je me précipitais vers mon téléphone pour voir si un message n’avait pas été laissé sur mon répondeur. La plupart du temps, il n’y avait rien et parfois j’écoutais avec haine des messages publicitaires des porte-manteaux solido qui prenaient un malin plaisir à me persécuter. Allez savoir pourquoi.

 

La fac de Nice ne me vit jamais cette année-là. J’enrageais, j’étais mal et j’écrivais des poèmes : 

  

 Que les nuits sont fragiles,

 Et les nuages  bas,

 Quand tu grondes, fébrile,

 Que tu ne m’aimes pas.

 

 Et les heures  se figent,

 Les minutes sont folles,

 Comme des fleurs sans tige,

 Echouées sur le sol.

 

 Je ne sens plus ta bouche,

 Ta peau est loin de moi,

 Quand tu gis sur ma couche,

 Je ne suis plus ton roi.

 

 Ma voile est en lambeaux,

 Je suis un frêle esquif,

 Qui sombre au fond de l’eau,

 Coulé par les récifs.


 A suivre...

 

 

 

                                    

 


 
 
posté le 06-04-2021 à 06:44:24

Marina (8).

 

 

Les jours qui passaient avaient l’odeur d’un caoutchouc abandonné au soleil.

Les heures élastiques semblaient parfois se figer dans la glu.

J’attendais, sans trop d’illusions maintenant, son coup de téléphone. Je me disais, que, peut-être, les fêtes de fin d’année approchant, elle allait se décider à me faire signe pour me présenter ses meilleurs vœux. L’espoir fait vivre, mais le désespoir tue.

Mon téléphone était devenu mon principal centre d’intérêt. Je le regardais, de loin, de près, comme si j’allais le voir sonner. Je me demandais si la ligne n’était pas coupée et cent fois dans la journée, je décrochais le combiné pour écouter la tonalité, signe que tout fonctionnait bien.

L’attente est un poison insidieux qui malaxe les neurones, parce que l’on n’a pas de prise sur elle. L’attente est l’inaction totale, la dissolution de la volonté dans un bouillon froid et sans saveur. Alors de temps en temps, pour mettre fin à ce malaise, je décrochais le téléphone pendant une heure et là, j'annihilais  mon angoisse. Pendant une petite heure j’étais tranquille, je vivais sans attendre. Et puis ça recommençait, car je me disais « et si elle a appelé quand c’était décroché ? ». Autant dire que je me pourrissais la vie. Parfois le téléphone sonnait et souvent c’était de la part des « portemanteaux Solido ».

Un jour, quand le désespoir frôlait la déraison, je me décidais à être un peu plus aimable avec le représentant. C’était une femme, apparemment jeune, qui me proposait une promotion exceptionnelle. Surprise que je ne raccroche pas, elle me dit « voilà, si vous achetez dix portemanteaux, le onzième est gratuit ! » Je ne pus m’empêcher de rire et pourtant je n’en avais pas envie. Je voulus la taquiner « et que ferais-je avec dix portemanteaux ? » Elle avait dû prévoir cette question, car elle me dit « vous savez, c’est bientôt Noël et vous pourriez en faire des cadeaux ». Décidément, c’était drôle. Je ne me voyais pas offrir un portemanteau à Noël à ma nièce qui avait douze ans. Mon interlocutrice semblait pressée, je lui en fis la remarque. Elle répondit « ho, vous savez, je suis obligée d’appeler au moins cent personnes par jour ! » Quand je raccrochais, un doute subit monta au niveau de ma conscience et je me surpris à penser à haute voix : « je suis sur la liste rouge et comment se fait-il qu’elle ait mon numéro ? » Et soudain une évidence s’afficha sur l’écran virtuel de mon cerveau.

Non, ce n’était pas possible ! Et si… et si cette représentante de la maison Solido était…


A suivre

 

 


 
 
posté le 07-04-2021 à 18:33:50

Marina (9).

 

 

 

 A force d'espérer son appel, ma vie devenait du caramel mou bien dégoulinant...

 Il fallait que je reprisse mes esprits. Ma supputation était hasardeuse et peu convaincante. Pour résumer la situation : un jour néfaste et gris, ma voiture avait heurté une jeune femme sans la blesser. J’étais tombé sous son charme et pour essayer d’établir une relation entre nous, je lui avais donné mon numéro de téléphone. A partir de là, ce fut le délire, l’enfer quoi !

Chaque jour j’attendais son appel ; je ne vivais que pour cela et bien entendu je ne recevais rien. Ma vie s’était focalisée sur mon téléphone, je restais près de lui, je le surveillais pour le voir sonner. Le voir sonner ? Encore un délire de mes sens ! Mais à la même époque et pratiquement tous les jours, je recevais un appel publicitaire des porte-manteaux Solido. Au bout du fil, une femme dont j’interrompais toujours son déballage publicitaire brutalement. Et soudain, un jour où mon amertume était pire que celle de la bile des morues de l’océan Indien, un petit court-circuit cérébral m’amena à cette hypothèse folle : et si cette femme n’était autre que celle que j’avais renversée ? La seule chose qui me gênait, c’était pourquoi elle ne se révélait pas.

Le temps est un caramel mou qui colle sur les doigts et qui étouffe les neurones. J’aurais pu mener une petite enquête, chercher l’adresse de la société Solido et essayer de la voir. Mais non, mon inertie aboulique, attachait mes membres à un poteau de torture que je détestais, mais que je ne voulais pas quitter.

Le 1er Janvier, je décidais de me remettre au travail pour préparer mon agrégation de chimie, en vain. Je faisais assez d’efforts, pour l’oublier, elle, et il ne me restait plus d’énergie pour les études. A force d’espérer, on se désespère, alors on sort le bistouri et on massacre à l’aveuglette tout ce qui nous fait souffrir. On n’est pas loin du stade larvaire, mais on est mieux.

La société Solido espaçait ses appels et mon téléphone commença à se recouvrir de poussière. Le 18 Février vers vingt heures, je reçus un coup de fil qui me mit mal à l’aise. Marina, m’appelait. Marina, professeur de SVT dont le labo était situé juste en face du mien au rez-de-chaussée, près du hall d’entrée du collège.

Comment dire ? Si Marina avait été un porte-manteau, moi, j’aurais été un parapluie…

 

A suivre

 

 
 


 
 
posté le 09-04-2021 à 11:16:14

Marina (10).

 

 

C’est vrai que j’aime les parapluies ou disons plutôt que j’en ai besoin. J’en achète au moins trois par an. Je n’en fais pas la collection, mais souvent dans notre région, le vent souffle fort pendant les orages. Et les parapluies sont fragiles surtout au niveau des baleines…

On peut dire que Marina était une belle femme. Grande, élancée et sportive, un peu trop à mon goût. Elle était gentille, sympathique et intelligente. Divorcée et donc libre, elle avait tout pour plaire. Tout ou presque…

Elle venait souvent dans mon labo pour que je lui prête des tubes à essais, des béchers ou des produits chimiques. Moi, j’allais chez elle lorsque j’avais besoin de glaçons par exemple. Elle avait un frigo dans lequel, elle conservait des cœurs de moutons, des cuisses de grenouilles, des échantillons de sang, etc… Elle était bon public et riait facilement quand je lui racontais des blagues.

Elle me retéléphona le 19 Février, le lendemain donc. Elle avait l’air angoissée ; elle était confrontée à différents problèmes. J’étais prêt à l’aider et à lui prodiguer quelques conseils. Elle m’écoutait et avait confiance en moi. Je lui demandais donc de tout me dire au téléphone. Elle me répondit que ce serait trop long et qu’il vaudrait mieux qu’on se rencontrât. J’étais en pleine année sabbatique et je n’avais pas envie de retourner au collège, de voir les collègues et de leur parler. Je lui proposais de nous retrouver dans un bar, elle refusa, tout comme au restaurant d’ailleurs. « Alors, comment fait-on ? » dis-je, un peu exaspéré. Elle murmura une phrase que je ne compris pas bien et que je lui demandais de répéter. « Tu pourrais venir chez moi ! » dit-elle timidement.

C’était une aubaine, elle était belle et sexy et souvent quand je la voyais, revêtue de sa blouse bleue-ciel, je fantasmais sur elle et je me faisais des scénarii, dans lesquels intervenaient son labo, sa paillasse carrelée de faïence blanche, le squelette humain suspendu à une potence et même l’odeur de formol qui s’échappait des bocaux où étaient conservés des souris, des grenouilles et des oiseaux morts…

Aller chez elle, ce fut toujours mon rêve et j’imaginais même comment ça pourrait finir… Et pourtant avec ma verve habituelle je répondis : « euh, euh… » qu’elle n’apprécia pas beaucoup.

Elle avait tout pour plaire. Tout ou presque…

A suivre    

 
 


 
 
posté le 11-04-2021 à 11:17:18

Marina (11).

 

 

 Marina avait tout pour plaire, mais, dans le collège, des bruits couraient sur elle…Des médisances certainement. Certains disaient qu’elle était érotomane. En gros, pour simplifier, l’érotomanie* est une maladie psychique qui concerne surtout les femmes et celles qui en sont atteintes imaginent que tous les hommes sont amoureux d’elles. Surtout à ne pas confondre avec la nymphomanie. Et quand une érotomane jette son dévolu sur un homme, pour lui cela devient un enfer. Vous comprendrez alors pourquoi, bien que je fusse attiré par Marina, j’hésitais à entreprendre une relation quelconque avec ma collègue. Mais quand elle me téléphona ce soir-là pour m’inviter chez elle, j’acceptais. Je ne sais pas dire non aux femmes, surtout quand elles sont belles et sexy. J’étais libre, je ne risquais pas grand-chose pensais-je naïvement.

Elle habitait dans une villa située à l’entrée de la ville. Je garais ma voiture à côté de la sienne, une BMW 325. Moi j’avais une voiture italienne, moins robuste mais plus nerveuse.

Elle me fit entrer dans sa maison en passant par un hall où se trouvaient deux portemanteaux sur pied en bois massif, du chêne probablement. J’eus un bref moment de panique quand je dus y suspendre mon parapluie. Lequel utiliser, le portemanteau de gauche ou celui de droite ? Marina se mit à rire car il ne pleuvait pas. Je me défendis comme je pus en affirmant qu’il y avait un cumulo-nimbus à l’horizon. Finalement c’est elle qui décida pour moi en l’accrochant sur un troisième portemanteau mural qui avait échappé à mon regard de taupe.

Dans le salon, elle s’assit en face de moi : erreur de débutante, car j’avais une vue plongeante sur ses belles cuisses musclées, sous sa jupe courte bleu-marine. J’avais tendance à ne pas regarder son visage lorsqu’elle me parlait… Et elle commença à me raconter tous ses petits soucis qui concernaient les élèves paresseux et insolents, l’administration et les collègues. Moi je l’écoutais d’un "œil" distrait, occupé qu’il était, à essayer d’entrapercevoir un morceau de culotte entre ses cuisses de sportive.

Et soudain elle me dit : « je sais pourquoi tu as pris une année sabbatique ! » Mais tout le monde le savait, c’était pour préparer mon agrégation de chimie. Elle ne m’écoutait pas et elle m’asséna cette phrase inquiétante : « j’ai compris que tu étais amoureux de moi ! » J’allais répondre, mais elle m’empêcha de parler, « oui, tes regards, ta gentillesse et ton empressement à me rendre service ; ce sont bien les signes d’un homme amoureux ! » J’étais abasourdi ; j’avais envie d’elle, ça c’est sûr, mais je ne voulais pas mêler l’amour au sexe.

Je commençais à croire que les rumeurs étaient fondées : j’étais bien en présence d’une érotomane. Je prétextais une envie pressante pour essayer de reprendre mes esprits. Les toilettes étaient au premier étage.

A gauche et à droite du lavabo, il y avait deux portemanteaux sur pied en bois laqué blanc. Dans le couloir qui conduisait à la salle de bains j’avais aperçu trois portemanteaux muraux en bois sombre et qui ne portaient rien. En comptant bien ça en faisait huit et encore, je n’avais pas vu toute la maison. Avant de la rejoindre, en bas, j’aperçus une plaque ovale en cuivre sur le pied des portemanteaux ; c’était le logo de la marque. Je me baissais et ce que je vis alors, me fit l’effet d’un bain dans le lac Baïkal**…

A suivre

*Érotomanie:

L’érotomanie est un trouble délirant dans lequel l'individu affecté est persuadé qu'il est aimé par un autre individu, habituellement inconnu ou une personnalité. Ce trouble survient lors d'une psychose, particulièrement chez les patients souffrant de schizophrénie ou de syndrome maniaque. Lors d'un épisode d'érotomanie, le patient est persuadé qu'un « admirateur anonyme » lui déclare son affection, souvent par le biais de télépathie, de messages secrets, de regards, de messages dans les médias. Habituellement, le patient lui retourne cette « affection » en lui écrivant, en lui téléphonant et en lui faisant des cadeaux. Même quand ses avances sont rejetées par la personne qu'elle aime, les sujets souffrants de cette maladie ne comprennent pas le refus. Elles peuvent ne pas comprendre le refus ou imaginer que leur objet d'amour délirant use d'un stratagème pour cacher cet amour interdit au reste du monde.

**Lac Baïkal :

 

 

 

Le lac Baïkal est un lac situé dans le sud de la Sibérie, en Russie orientale. Il représente la plus grande réserve d'eau douce liquide de surface au monde (environ 23 500 km3). Sa transparence est unique et la visibilité parfaite jusqu'à 40 mètres de profondeur.

Il s'étend sur une longueur de 636 km avec une largeur moyenne de 48 km et une superficie de 31 500 km2, ce qui fait de lui le 8e lac au monde. C'est le lac le plus profond du monde (jusqu'à 1 637 m d'épaisseur d'eau, reposant sur 7 000 mètres de sédiments). Son volume d'eau (environ 23 500 km3) représente environ 260 fois celui du lac Léman, soit autant que la mer Baltique ou que les 5 grands lacs nord-américains (lac Supérieur, lac Michigan, lac Huron, lac Erié, lac Ontario) réunis. Il représente 20 % du volume mondial d'eau douce contenue dans les lacs et les rivières.

 


 
 
posté le 12-04-2021 à 18:31:26

Marina(12).

 

Sur le logo en cuivre terni, était gravée la marque du portemanteau : Solido. Décidément Solido me poursuivait. Deux femmes étaient liées à cette marque : celle de l’accident et Marina la prof de SVT.

Je voulais fuir, mais plus que la curiosité, l’instinct de survie me susurrait de rester pour éclaircir cette situation confuse.

Je rejoignis Marina au salon et je m’assis sur le canapé, à côté d’elle. Je n’avais plus la vision de ses belles cuisses, mais cela était compensé par son parfum que je crus reconnaître : Les Jardins de Bagatelle de Guerlain. Le parfum d’une femme est un message qu’elle envoie à ceux qui s’approchent d’elle. Mais il n’est pas sélectif ; ce n’est pas une flèche qui atteint l’être aimé, mais un brouillard qui diffuse et qui touche même ceux qui lui sont indifférents.

Elle reprit son monologue interrompu : « Oui je sais que tu m’aimes et tu as pris une année sabbatique pour t’éloigner de moi, parce que tu souffrais trop ! »

Note de l’auteur : moi souffrir à cause d’elle ? Première nouvelle !

Ses yeux étaient aussi mobiles que sa pensée exprimée par des mots qui se bousculaient, qui se chevauchaient ; elle voulait tout dire en même temps. Elle continua à parler. Je commençais à sombrer dans une somnolence que je combattais de toutes mes forces ; je ne dors que trois heures par nuit et souvent elle déborde sur mes journées. J’avais trouvé un truc pour lutter contre le sommeil : je regardais ses seins moulés dans un pull noir. Ses seins  qui bougeaient au rythme de ses émotions et moi j’aurais bien aimé les maintenir. J’imaginais leur taille, leur fermeté et même leur malléabilité. Sa bouche avait des lèvres prometteuses et parfois, comme la tête d’une tortue timide, sa langue humide apparaissait pour m’affoler.

En moi, il se passait bien des choses, des réactions hormonales incontrôlables, provoquées par la vue et l’odorat. Je devenais un homme préhistorique, presqu’une bête chasseuse, poussé par l’instinct de reproduction. Et puis le verni de la civilisation réapparaissait et recouvrait toutes mes pulsions et alors je recommençais à l’écouter. « Oui, tu es parti parce-que tu m’aimais trop et que tu avais peur que je te repoussasse ! » Elle me regardait en prononçant cette phrase qu’elle croyait vraie.

« Et si je tentais de l’embrasser brutalement, comment réagirait-elle ? »

Moi, en ce moment, j’avais des idées moins philosophiques. Je me rapprochais de son corps comme un escargot famélique. Son parfum devenait plus enivrant et dans ma tête reprenait la valse à mille temps du concert des cavernes. Brusquement ma bouche se colla à la sienne. Ses lèvres avaient la douceur des vieux chamallows de mon enfance et le parfum des bonbons acidulés au goût de mandarine. Elle se laissa faire et je pris cela comme un encouragement…

A suivre

 

 

 

 

 


 
 
posté le 14-04-2021 à 18:33:59

Marina (13).

 

 

 Ma langue était dans sa bouche et je me mis à penser aux portemanteaux Solido, ce qui fit baisser d’un ton mes sécrétions hormonales. Et si les appels téléphoniques que je recevais de la société Solido provenaient d’elle ? A ce moment-là, ma langue se prélassait sur la sienne, doux coussin humide qui incitait à la débauche. Mais non, j’aurais reconnu sa voix ! C’est vrai qu’elle était douée pour imiter les cris des animaux et quand je passais devant sa salle, j’entendais parfois le piaillement des hulottes cendrées ou le barrissement des éléphants d’Afrique qui faisait rire ses élèves. Et donc, elle aurait pu maquiller sa voix pour imiter celle d’une jeune femme inconnue.

Sa salive avait un goût de mandarine. A cause de son dentifrice ? Peut-être pas, car mes yeux-radars venaient de repérer sur une petite table ronde, un panier en osier qui contenait ces fruits. Bouche contre bouche et mon nez, qui frôlait sa joue, parfumée par « Les jardins de Bagatelle », entrait en extase olfactive. Mes mains ne savaient pas où se mettre : elles hésitaient entre le haut de ses cuisses et ses seins qui me semblaient avoir la forme de poires africaines peu académiques, mais tellement excitantes.

Le Premier Baiser, c’est la découverte de l’Amérique par Christophe Colomb ou la trouvaille de la pénicilline par Alexander Fleming. C’est un flot d’émotions inédites qui se crée pour chaque nouvelle femme. Et pourtant la salive du Premier Baiser est la même que celle du crachat. Les émotions, l’amour et le désir magnifient ce liquide banal qui s’écoule de la bouche de l’être aimé.

Finalement, mes mains sonnèrent la révolte des peuples opprimés et prirent leur indépendance en se posant sur les seins de Marina, dont les tétons se mirent à éclore. Mes doigts fureteurs ne faisaient que fureter. Ma main voulait explorer, sentir la texture des territoires tabous, ceux que l’on cache habituellement. Alors elle alla fouiner entre ses cuisses.

Le grain de peau change quand les doigts, partant juste au-dessus du genou, remontent vers l’aine. La peau devient de plus en plus douce, de plus en plus sensible, de plus en plus chaude…C’est le premier pas de la découverte qui se fait par les mains ou par les yeux. Marina poussait de petits soupirs qui indiquaient le degré de son plaisir et sa bouche sur la mienne murmurait des mots que je ne comprenais pas. Je me perdais dans les méandres de ses désirs en essayant de comprendre tous les signaux qu’elle m’envoyait.

Sa main cherchait en moi la traduction de sa puissance érotique, comme l’appareil qui mesure la dureté du béton armé. Et mes doigts devenaient marins abordant une terre encore inexplorée, quand une houle aussi brutale qu’imprévisible rejeta leur navire loin des côtes. Elle se détacha de moi ; sa bouche, bouée de chair dans la tempête de mes plaisirs, s’éloigna de mon corps et me laissa suffoquer comme le plongeur sans oxygène.

Et l'érection cessa faute d'excitation*.

Je lui dis : « mais pourquoi ? »

Son regard avait la finesse des diamants tailleurs de pierres précieuses quand elle me répondit : « excuse-moi, je ne peux pas ! » Je me sentis alors devenir un escargot dans sa persillade, prêt à aller au four. Elle continua, en regardant ma bouche : « je veux rester fidèle à mon mari ! » Ma réplique fusa comme la flèche de Guillaume tell : « mais tu es divorcée ! » Elle eut un rictus inquiétant pour me dire : « non, non, je suis veuve ! ».

Je ne comprenais plus rien ; le puzzle, avec ses dix-mille pièces devenait trop compliqué pour mon cerveau.

Quel était donc le mystère de Marina, ce professeur de SVT, veuve et érotomane ?


A suivre

 

 

                      Notes:                                        

 

*Et le combat cessa faute de combattants.

Le Cid (1636), IV, 3, Rodrigue

 Pierre Corneille.

  

 


 
 
posté le 16-04-2021 à 18:31:57

Marina (14).

 

                                                               Marina et moi

                                                                ou

                                       l'obsession des portemanteaux "Solido".

 

Le lendemain de cette relation avortée, je me sentais plutôt maussade et j’en voulais beaucoup à Marina d’avoir joué le rôle de pimbêche effarouchée.

« On ne m’y reprendra plus ! » pensais-je en me rasant, le matin, devant un miroir qui se moquait de moi. Vers neuf heures, je m’installais à mon bureau pour étudier « la spectrographie RMN appliquée aux molécules organiques ». Rien de bien folichons, ces spectres dont les pics nous indiquaient la nature des radicaux carboniques. A neuf heures trente, le téléphone sonna.

« Tu peux toujours sonner, je ne décrocherai pas ! » dis-je au téléphone qui n’y pouvait rien. A la seconde sonnerie, je me précipitais vers lui comme un meurt-de-faim en espérant entendre la voix de Marina… C’était la fille des portemanteaux Solido qui me relançait pour l’achat de leurs produits. Je fus désagréable avec elle et lui raccrochais presqu’au nez. A dix heures, deuxième appel : j’étais en train de somnoler devant les spectrogrammes indigestes.

« Oui ? » dis-je avec l’énergie d’une pile en fin de vie.

C’était Marina qui avait l’air aussi gênée qu’une anorexique devant un baba au rhum.

Elle me dit qu’elle avait besoin de moi de toute urgence et que si j’étais gentil (je le suis trop hélas), j’irais la rejoindre à treize heures quarante-cinq dans son labo.

« Mais, ce n’est pas ce que tu crois… » ajouta-t-elle et après un bref moment de silence, elle compléta : «…Heu enfin, un peu, peut-être ! »

Je ne comprenais strictement rien à ce qu’elle me disait ; mais comme j’avais envie d’aller prendre l’air, j’acceptais.

Prendre l’air, façon de parler, car son labo empestait le formol.

Quand je la vis, revêtue de sa blouse blanche, un fantasme endormi, soudain se réveilla ! Elle m’expliqua la situation :

« Je dois faire une leçon sur la reproduction humaine en 3ème A et il faut à tout prix que je leur montre des spermatozoïdes au microscope. »

Je répliquais qu’elle aurait pu préparer tout ça la veille au lieu de me déranger. Elle argumenta :

« Mais les spermatozoïdes doivent-être vivants et leur durée de vie à l’air libre est très courte. »

Je comprenais où elle voulait en venir. Elle alla chercher un verre de montre (petite coupelle) qu’elle me tendit en me disant : « tu peux le faire là-dedans ».

« Mais faire quoi ? » répondis-je pour la taquiner.

En femme de sciences, elle utilisa les mots précis : « Eh bien, te masturber et éjaculer dans le verre de montre ! »

La situation devenait cocasse et pour me moquer d’elle, j’utilisais la blague préférée des machos :

« Mais ça va déborder, donne-moi plutôt un bécher de 250 mL (un quart de litre) ! »

Cela ne la fit pas rire. Elle me dit : « allez fais vite, les élèves vont arriver ! »

Faire vite, faire vite, elle me faisait bien rire Marina !

« Mais, il faut que tu m’aides pour ça ! » dis-je en essayant de profiter de la situation. Elle était exaspérée et elle vint vers moi en criant presque « ouvre ta braguette ! » C’était un ordre ! Et elle ajouta : « je vais prendre les choses en main !»

Les choses ? Elle voulait dire la chose plutôt !

Devant nous, le squelette nous regardait avec un air rigolard…

 

A suivre

  

 

 


 

 


 
 
posté le 20-04-2021 à 07:05:06

Marina (15).

 

Allez, fais vite,

Marina nous attend ! 

 

Elle mena l’affaire de main de maître : quelques minutes plus tard, j’avais maigri de quelques grammes, le poids* de ma virilité. Il faut dire qu’au milieu de l’épreuve, elle profita d’une soi-disant fatigue de ses doigts, pour les remplacer, pendant quelques secondes, par sa bouche qui s’activa avec ardeur. Le verre de montre était plein à ras-bord. Elle y trempa le bout de sa langue et murmura : « hum, ton sperme a bon goût et il est bien épais, on dirait que tu n’as pas fait l’amour depuis plus d’un mois ! » Je répondis par un « euh » gêné et j’ajoutais : « euh, effectivement ». Pour la première fois, elle me regarda avec tendresse et me dit : « il faudra que je remédie à ça ! » Etait-ce la promesse d’une future folle nuit d’amour ? Pour reprendre l’avantage et pour me moquer un peu d’elle, je lui dis : «  on dirait que tu es une spécialiste pour ce genre d’activité manuelle… ! » Dans ses yeux passa une ombre de mélancolie et elle rétorqua : « Avant d’être prof, j’ai travaillé plusieurs années dans un CPA ! » Je la regardais sans comprendre, alors elle m’expliqua : « Oui un Centre de Procréation Assistée et là-bas on m’avait surnommé Marina la fermière ». Je ne voyais pas exactement le rapport. Elle comprit et compléta sa phrase : « oui j’étais trayeuse** ! » Ce fut un cri du cœur : « trayeuse ? ». Elle répliqua agacée : « tu veux que je te fasse un dessin ? »

Je comprenais tout maintenant et je me demandais si elle ne se moquait pas de moi.

L’odeur de formol me donnait un peu la nausée et ce n’était pas le top pour la digestion. Mon regard chercha les flacons qui contenaient ce produit chimique et qui étaient certainement mal bouchés. Et alors, je fis une étonnante découverte : le squelette humain qui nous regardait avec un air goguenard, était suspendu à un porte-manteau en bois massif. En regardant son pied, j’aperçus le logo en cuivre qui luisait sous la lumière des néons : c’était un portemanteau Solido ! 

Pour me remercier, Marina, reconnaissante, me tendit ses lèvres. Sa salive avait un goût de sperme, le mien en l’occurrence et je me demandais comment les femmes pouvaient supporter ça. C’est vrai, que les femmes et le sperme, c’est une drôle histoire d’amour.

« Bon, allez file maintenant ! Les élèves vont arriver. » Elle commençait à devenir nerveuse. J’étais presque dans le couloir, quand elle me rattrapa en me disant : «Attends un peu, j’ai plusieurs choses à te dire ! » Et avec ses doigts elle m’indiqua le nombre trois.

1/ « Alors à demain, même heure dans mon labo ! J’aurai la 3èmeB cette fois-ci et il me faudra une bonne dose… »

2/ « Et demain, inutile d’apporter ton parapluie. La météo a annoncé du très beau temps comme aujourd’hui. »

3/ « Jean Claude, l’autre prof de SVT, a les 3èmeC et D. Et il aura besoin de tes services la semaine prochaine pour ses TP sur la reproduction humaine… »

Alors là, c’en était trop. Je lui coupais la parole :

« Non, il n’est pas question que Jean-Claude ait mon sperme ! Et tu veux qu’il m’aide comme tu l’as fait ? C’est ça ? Mais il n’a qu’à prendre le sien ! »

Marina était gênée. Elle me dit :

« C’est que Jean-Claude souffre d’aspermie*** ! » 

Voilà, dans ce collège, on me prenait pour un taureau reproducteur !

« Adieu ! » dis-je à Marina, « tu ne me reverras plus ! »

Elle sourit et murmura « Alors à demain mon chou ! »

Elle savait que mon adieu était un adieu de pacotille et quand j’entendis « mon chou», je crus mourir d’amour pour elle…


                                                                                        A suivre


Notes:

 

* La masse en fait, c’est une quantité de matière exprimée en grammes. Le poids, en Newtons, est dû à l’attraction terrestre.

** trayeur,euse :Personne dont la fonction est de traire.

*** aspermie : absence de sperme après l’orgasme.

 

  

 

 

 

 


 
 
posté le 21-04-2021 à 07:28:49

Marina (16).

 

 

La nuit qui suivit fut aussi blanche que les dents de Barak Obama.

La question était de savoir si je devais aller au collège me « vider » pour remplir mon « devoir de citoyen » ou bien abandonner Marina et ses caprices. Il faut dire qu’elle m’avait laissé entrevoir une étonnante palette de ses capacités sexuelles.

Et à 13h45, je frappais à la porte de sa salle. Auparavant, j'étais passé dans la mienne pour y déposer mon parapluie qui déplaisait temps à Marina.

« Entrez ! » me dit-elle avec une voix qui devait impressionner les élèves. Elle était assise sur un tabouret et corrigeait des copies sur une table de la classe.

Elle avait l’air distante ; elle ne leva pas le nez pour m’accueillir.

« Ca commence bien ! » pensais-je en ayant une furieuse envie de rebrousser chemin. Elle me regarda enfin et me dit : «  il y a un petit contretemps. Les 3èmes B sont de sortie avec leur professeur principal et donc mes travaux pratiques sont annulés ». J’étais à la fois soulagé et déçu et je la regardais avec des yeux de homard bouilli (1).

« Tu aurais pu me prévenir ! Ce qui fait, que je suis venu pour rien !» lui dis-je avec un air de reproche.

« Pas tout à fait pour rien ! » répondit-elle et elle ajouta « suis-moi dans mon labo! »

Dans son labo, planait toujours cette odeur de formol qui me faisait penser à des cadavres. Elle referma la porte à clé et murmura en se collant à moi « dis-moi que tu m’aimes ! » et elle me fourra sa langue dans la bouche. Pour parvenir à mes fins, j’étais prêt à lui dire n’importe quoi, même que j’aimais les écologistes.

« Prends-moi sur la paillasse (2) ! » cria-t-elle, sans se soucier des élèves qui traînaient dans le couloir. C’est que sur la paillasse, il y avait des tubes à essais, des béchers, une dizaine de compte-gouttes qui contenaient de l’acide chlorhydrique dilué, des pissettes et pas mal de flacons remplis de formol dans lesquels baignaient avec délice, les corps sans vie de grenouilles, de souris, de lézards, de serpents (3) etc…

Du doigt, je lui désignais tout ce bazar. Avec une main, elle fit un peu de place et en me tournant le dos, elle se pencha sur la paillasse, dans une position que l’on pourrait qualifier de semi-levrette. En même temps, elle releva sa jupe pour découvrir ses fesses et un string qui n’avait rien de très catholique. Moi, j’étais tendu comme la corde de l’arc de Geronimo (4).

Le premier contact entre deux organes faits l’un pour l’autre a quelque chose de sublime. Je me sentais bien dans son cocon humide et comme le piston d’une locomotive à vapeur (5), j’effectuais un mouvement alternatif de translation comme dirait le physicien que je suis.

Au moment de l’orgasme, elle cria : «  Ho, Roger, Roger, hooooo ! » en serrant la main décharnée du pauvre squelette qui avait assisté à la scène.

Elle se redressa et s’essuya avec du papier filtre qui traînait sur la paillasse.

Mais moi, curieux comme un ver de terre amoureux, je lui demandai : « Mais qui est Roger ? » Ce n’était pas mon prénom, alors c’était celui de qui ?

Elle me regarda, désemparée, en cherchant une réponse crédible.

« Mais Roger, c’est le nom que j’ai donné au squelette ! » me dit-elle, soulagée.

Je la crus autant qu’un dentiste ougandais qui arrachait des dents sans anesthésie et sans antiseptique, dans la brousse africaine.

Ce que je savais, par contre, c’est que dans ce collège, il y avait deux professeurs qui se prénommaient Roger et là, je me préparais à mener ma petite enquête…


A suivre


 


Notes :


 

1 : …des yeux de merlan frit…

2 :  Une paillasse de laboratoire ou une table de manipulation désigne un plan de travail dont le revêtement est par exemple carrelé, vitré, en matière plastique ou stratifié, afin d'en faciliter le nettoyage.


 


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3 :


 


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4 : Geronimo, né le 16 juin 1829 et mort le 17 février 1909, appelé à sa naissance Go Khla Yeh, parfois écrit Goyathlay, était un guerrier apache qui a combattu le Mexique et les États-Unis.


 


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5 :


 


Le piston a un mouvement alternatif de translation dans le cylindre.

 

 

 

 

 


 


 
 
posté le 24-04-2021 à 15:00:08

Marina (17).

 

 

 

Dans  un coin de la salle des profs pendant la récré de 10h.

La salle des profs, une salle de shoot au café?

 

La nuit fut plus agitée que les eaux du cap de Bonne Espérance(1), car je cherchais une stratégie pour récolter le maximum d’informations sur les deux professeurs qui se prénommaient Roger.

Mon année sabbatique était largement entamée et j’avais beaucoup de temps de libre, vu que je préparais mon agrégation de chimie avec le sérieux d’un clown déprimé. Le matin qui suivit, je m’arrangeais pour me trouver dans la salle des professeurs à neuf heures cinquante, moment stratégique, quand les fauves vont se désaltérer dans la petite rivière sous les arbres ou plus exactement quand les professeurs viennent boire leur petit café à la machine à boissons. C'était la récréation de dix heures.

Après deux heures de cours, les professeurs s’étaient déjà transformés en zombis, sous les assauts des élèves insolents et paresseux. Ils étaient excités comme des mouches affamées et se racontaient, les uns aux autres, leurs petites mésaventures matinales. Certains couraient aux toilettes, d’autres prenaient d’assaut la photocopieuse en fin de vie. Moi j’observais toute cette agitation, assis dans un fauteuil, un peu à l’écart.

Et soudain, la minute de nostalgie(2) : ELLE entra dans la salle, sans rien dire et me tourna le dos en se baissant un peu pour se servir un café. ELLE était en jeans qui moulait ses fesses et mon cœur, un moment, ne battit que pour ELLE.

J’attendais les deux Roger, en espérant qu’ils soient présents ce jour-là. Ma patience fut récompensée quand je vis arriver Roger Ballopié, le prof d’EPS (Education Physique et Sportive). Je le trouvais vieilli. C’est vrai qu’il avait soixante-trois ans et qu’il avait plein de rhumatismes et un souffle au cœur. Mais vaillamment, il remplissait sa mission d’enseignant pour l’amour des élèves. En réalité, il avait prolongé son activité pour avoir une meilleure retraite. Je ne voyais pas ce Roger Ballopié, s’activer sur Marina ; son souffle au cœur l’aurait tué. Et donc j’éliminais cette piste. Il ne restait plus que Roger Meridiani, le prof de sciences humaines (histoire-géo) qui était en retard et qui devait certainement ranger ses cartes de géographie dans le petit réduit poussiéreux qui lui servait de remise. Il avait la quarantaine, divorcé, discret et relativement sympa. Seulement, des bruits couraient sur son compte ; on disait qu’il était impuissant. C’était quelque chose à vérifier et si cela était vrai, je l’aurais ainsi éliminé de la liste des amants de Marina la trayeuse.

Pour pouvoir résister au stress, les professeurs avaient trouvé un dérivatif qui se passait dans les labos, les remises sans fenêtre, les toilettes et les salles inoccupées. Cet échangisme forcené se passait loin des élèves, qui eux menaient une vie bien plus « hard » que la nôtre.

Voilà pourquoi, à cause des ruptures et des réconciliations, planait sur le collège une atmosphère malsaine de médisances.

En contactant un ami du prof de sciences humaines, j’appris ainsi que la rumeur de son impuissance avait été lancée par Lucie, la prof d’arts plastiques qui avait été lâchement abandonnée par Roger Meridiani, pour une jeune stagiaire de vingt ans.

Moralité : à la fin de la journée, je tournais toujours en rond, sans aucune certitude.

Et pour ajouter à ma confusion, Christiane, la copine de Marina, me révéla un indice qui provoqua un effondrement de toutes mes suppositions…

A suivre

Notes :

 

1 : Cap de Bonne Espérance ou cap des tempêtes.

Il se situe au sud du continent africain.

Découvert par Bartolomeu Dias en 1488, le cap fut d'abord baptisé "cap des Tempêtes" en raison des courants et des vents marins qui s'y livrent bataille. C'est le roi Jean II de Portugal qui lui donna son nom actuel par la suite. En 1502, lors d'une nouvelle expédition, 4 vaisseaux sombrèrent au large du cap, avec à leur bord, Bartolomeu Dias.

Le choc des titans : l'Atlantique et l'Indien

Les eaux du cap sont très tourmentées à cause de la jonction entre l'océan Atlantique et l'océan Indien dont les courants très différents se rencontrent violemment : un courant froid à l'ouest et un courant chaud à l'ouest sont à l'origine de la réputation tumultueuse de ce passage obligé d'un hémisphère à l'autre.

 2 :Nostalgie :Du grec ancien νόστος nóstos (« retour ») et λγος algos (« douleur ») soit « douleur ressentie à la pensée du retour à la maison familiale, du mal du pays, d’une sensation passée ».

 


 

 


 
 
posté le 28-04-2021 à 06:46:42

Marina (18).

 

 Savoir s'arrêter à temps...


Christiane était l’amie intime de Marina et elle me parla d’elle, par bribes, comme si elle voulait la protéger. Mais de quoi ? Quand, elle me fit quelques confidences, juste en fin d’après-midi à dix-sept heures, avant de rentrer chez elle, usée par une journée de cours, je me demandai si ce qu’elle me disait, était mûrement réfléchi ou bien si c’était la fatigue qui entamait sa solidarité de bonne copine.

 Je ne pouvais m’empêcher de regarder Christiane avec une arrière-pensée de séduction qui remontait à la surface, malgré tous mes efforts pour me fondre dans le moule asexué que la société, adepte de la pensée unique, voulait nous imposer. Comment combattre cette montée en puissance des hormones, quand j’apercevais, entre les pans de sa jupe fendue, cet endroit, au-dessus des genoux, que l’on pourrait appeler « la naissance de la cuisse » ? Ce n’était pas grand-chose en réalité, mais au-delà de cette vision, c’était l’imagination qui prenait le relai. Et l’imagination est un bateau ivre (1) comme dirait Arthur Rimbaud.

En fait, Christiane, avant de filer vers le parking du collège, me révéla, sans plus de précision, qu’il existait un troisième Roger.

Le soir, seul dans mon appartement, j’avais l’impression d’être une bobine de fil, sans fil. Incapable d’entreprendre une activité quelconque, j’errais de pièce en pièce, comme un fantôme qui a perdu ses repères de temps et d’espace. Et ce qui s’ajouta à mon trouble indéfinissable, ce fut la sonnerie du téléphone qui me ramena à la réalité.

« Allo ? » dis-je, avec la conviction d’un moine défroqué du Moyen-Age. Et j’entendis la voix de la fille qui travaillait à la société Solido, qui commença à me faire sa pub sur les portemanteaux en acajou, en chêne et en bois plus qu’exotiques. Soudain, et je ne sais pas pourquoi, je lui coupais la parole et je lui dis :

« Marina, c’est toi ? »

Il y eut un bref silence et la fille raccrocha brutalement.

Mon intuition masculine avait-elle trouvé la clé de l’énigme ? Mon cerveau n’arrivait pas à rassembler les pièces d’un puzzle qui me paraissait diabolique. Je m’affalais dans mon fauteuil ; devant moi, sur la table basse en verre, se trouvait une bouteille de whisky largement entamée et un verre de la veille qui avait oublié de faire sa toilette.

« L’alcool tue les microbes ! » pensais-je en versant au moins deux doigts de whisky dans le récipient. Juste avant de boire, je dirigeai la télécommande vers le lecteur de Cd de ma chaîne Hi-Fi Sony et j’appuyais sur la touche « Play ». Avec ces appareils japonais, on avait intérêt à connaître l’anglais. Les premières mesures de « Moonlight Serenade » de Glenn Miller (2) s’accordaient bien avec l’alcool qui coulait dans ma gorge.

Parfois, le cerveau se caramélise et c’est ce qui m’arrivait quand j’écoutais du Jazz à deux heures du matin. La nuit, ce monde de chats, où le silence devient de la glu et où les horloges semblent enfin respirer avec leur tic-tac qui n’en finit plus.

 Lorsque les effets de l’alcool s’estompèrent, comme la brume sur un champ en Irlande, la présence de Marina se coagula dans mon esprit et je me demandais alors à quel jeu pervers elle me faisait participer. Qui était donc ce Roger qu’elle semblait évoquer au moment de son orgasme ? Le troisième Roger, alors que je n’en connaissais que deux.

Je n’eus qu’une réponse partielle, lorsque, la semaine suivante, je sommais Christiane de tout me révéler. En me montrant un peu ses cuisses, comme pour détourner mon attention, elle me dit :

« Mais Roger, c’était le prénom de son mari » !


                                                                                                                     A suivre


                                                        Notes


1 : …………….

Mais, vrai, j'ai trop pleuré ! Les Aubes sont navrantes.

Toute lune est atroce et tout soleil amer :

L'âcre amour m'a gonflé de torpeurs enivrantes.

Ô que ma quille éclate ! Ô que j'aille à la mer !


……………..


2 : Glenn Miller (Alton Glenn Miller) est un tromboniste et chef d'orchestre de jazz américain, né le 1er mars 1904 à Clarinda (Iowa) et disparu, probablement au-dessus de la Manche, le 15 décembre 1944.


 

 

 

 

 

 

 

 


 
 
posté le 30-04-2021 à 09:56:31

Marina (19).

 

En Français, en chinois...

 

L’alcool qui agit sur le cerveau, c’est de l’eau qui coule sur le sable pour en séparer les grains. Les neurones s’émiettent, se désolidarisent, veulent vivre sans dépendre des autres.

La nuit devient magique, le temps change de fréquence et les heures sont élastiques. La musique, sa comparse, berceuse de la pénombre, semble nous donner des facultés de lévitation.

Dans la semaine, je reçus un texto de Marina :

« - Envie de te traire

   - De boire ton lait

   - RDV demain au labo 13h

     Marina la trayeuse    »

C’était assez explicite pour m’exciter au plus haut point. Je trouvais qu’il y avait un brin de vulgarité dans ses phrases et de la part d’un professeur, cela semblait inconvenant. Je ne voulais pas que ce fût elle qui décidât le moment de nos rencontres. Alors je lui envoyais un texto :

« on verra + tard   » 

Cela la rendit folle et cinq minutes plus tard je recevais sa réponse :

« tu as intérêt à venir  »

Je regardais ma montre, il était 11h15 et comme tous les jeudis à cette heure-ci, elle devait être avec les 4èmeD. Elle agissait comme la plupart des élèves qui passaient (1) les heures de cours avec leur portable allumé sur leurs genoux et qui daignaient nous écouter pendant dix minutes par heure, une durée largement suffisante à leurs yeux.

Le lendemain à 12h55, je frappais à la porte de son labo qui était entrouverte. Personne ne répondit, alors j’entrai dans la pièce et je vis Marina assise, l’œil droit collé sur l’oculaire d’un microscope : elle devait certainement compter de nombre de spermatozoïdes présents dans 5 mm3 de sperme.

C’est ce que je lui dis et cela la fit rire. Elle me regarda avec des yeux vitreux qui me firent craindre le pire et répondit :

« Oui, c’est ça, mais ils ne sont pas très vaillants ; ils remuent à peine ! »

Alors je répliquai :

« C’est sûr qu’ils n’ont pas la vitalité des miens ! »

Elle se leva brusquement et murmura :

« C’est ce que je vais vérifier tout de suite ! »

Bon, je n’étais pas venu pour rien. Elle ferma la porte à clé et regarda ma braguette avec concupiscence. Elle ajouta :

« Mais aujourd’hui, c’est pour ma consommation personnelle ! »

Le squelette, toujours présent, semblait nous regarder ; un regard d’outre-tombe avec ses orbites osseuses sans yeux. En désignant ce tas d’os avec mon index droit, je dis à Marina :

« Mais avec lui, c’est un peu gênant ! »

Elle répondit en riant et cela m’inquiéta :

« Ho, il en a vu d’autres… »

Je pensais alors qu’il devait être prudent de se protéger avec un préservatif ; je lui en fis la remarque. Elle leva les yeux au ciel ou plutôt vers les néons qui diffusaient une lumière trop blanche et répliqua :

 « Mais je veux boire ton lait, moi ! »

Les femmes et le sperme : une histoire d’amour…

Et Marina la trayeuse entra en action.

Si je devais la noter, je dirais que sa copie était excellente : une bonne introduction, un développement parfait avec des expressions linguales étonnantes et une conclusion qui valait le détour. Ça valait bien un 18 sur 20 ! Un travail propre, sans bavure, sans tache : l’encre en excès avait bien été absorbée par le buvard (2) avide…

« Bon, je vais partir ! » lui dis-je, en l’embrassant sur la bouche. Je lui devais bien ça, quoique cela me dégoûtât (3) un peu…

« Tu plaisantes ! » répondit-elle, « on n’a pas encore fini ! »…

 

A suivre

 

Notes :

 

1 : Certains sujets sont faciles à identifier, mais il est plus difficile de savoir comment accorder le verbe avec eux. C'est le cas des sujets multiples, des noms collectifs et de certaines expressions.

Avec la majorité, l'accord est au singulier, avec la plupart, l’accord se fait au pluriel:

La majorité des élèves veut que nous arrêtions ici.

La plupart des élèves ne veulent plus travailler.

 2 : Buvard : Qui boit l’encre ( ou autre chose…)

3 : Après « afin que », « pour que », « jusqu’à ce que », « bien que », « quoique », le verbe est toujours au subjonctif.

- Quoiqu’il ne croie pas à cette stratégie, il accepte de jouer le jeu.

- Quoiqu’il fuie ses responsabilités, les actionnaires lui renouvellent leur confiance. Après « quoique », le verbe est au subjonctif.

Voir :

http://www.projet-voltaire.fr/blog/regle-orthographe/afin-que-quoique-indicatif-ou-subjonctif

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 
 
posté le 01-05-2021 à 13:32:53

Marina (20).

 

 


Je cherchais à gagner du temps, histoire de recharger mes batteries.

J’avais beau manger des tonnes de noix (1) qui sont censées, paraît-il, augmenter la production et la qualité du  sperme, je ne pouvais suivre la fréquence des envies de Marina. Elle avait déjà débarrassé la paillasse de son encombrante et fragile verrerie, du microscope et des flacons-vitrines de bestioles conservées dans le formol. Elle battait la semelle en attendant mon signal d’approbation, prête à se vautrer sur cette paillasse en retroussant sa jupe au-dessus de ses jolies fesses. Etais-je pour elle un homme-objet ?

Je lui fis les yeux doux, pour voir si elle était sensible à mon charme intérieur et je lui dis que je tenais beaucoup à elle, que je commençais à devenir amoureux. Elle me toisa, comme un analphabète qui regarde un tableau de Picasso, un homme-taureau avec la tête à l’envers et des attributs virils hors normes. L’amour et Marina ne semblaient pas aller très bien ensemble. Alors, comme je voyais qu’elle avançait vers moi avec des pensées plus que lubriques, je lui posais une simple question :

« Marina, dis-moi, mais qui est Roger ? »

Elle actionna ses freins ABS (2) et s’arrêta net sur le sol recouvert d’un linoléum gris brillant strié de lignes noires gondolées.

Le regard qu’elle me lança alors avait la détresse de l’homme à la mer qui a perdu sa bouée. Et pour une fois j’éprouvais pour elle, en plus du désir physique, de la compassion romantique.

Son silence pesant me fit reposer la même question à laquelle elle répondit, en regardant sa montre :

« Le temps passe vite, les élèves vont bientôt arriver, tu ferais mieux de te sauver ! »

En me disant cela, je vis son regard frôler le squelette suspendu au portemanteau Solido. Il est vrai que les couloirs commençaient à se remplir du bruit caractéristique des bisons gambadant dans la Pampa.

Je sortis du labo en lui envoyant un baiser avec mes doigts, oui ceux qui avait fureté entre ses cuisses.

A 13h30, j’étais de retour chez moi et à 14h mon téléphone sonna nerveusement : c’était la représentante des portemanteaux Solido qui me sollicitait encore.

Sa voix semblait nerveuse, angoissée. Elle me proposa la nouvelle gamme en bois d’ébène garantie à vie. Je me posais alors la question :

« A notre époque, peut-on faire fortune en vendant des portemanteaux ? »

Dans notre vie qui basculait de plus en plus dans le virtuel, je doutais que le bois massif eût quelque chance de perdurer.

Je cherchais dans l’annuaire le numéro de téléphone de la société Solido. Je composais le numéro et avec surprise, j’entendis un message bien caractéristique :

« Il n’y a pas d’abonné au numéro que vous avez demandé ! »

Et ainsi de suite avec la musique caractéristique qui modulait la même annonce répétée en boucle.

Pensant avoir mal tapé le numéro, je le refis et j’obtins le même résultat.

Bon, j’avais consulté un annuaire d’il y a deux ans et j’en déduisis que la société Solido avait dû changer de numéro de téléphone, ce qui me semblait bizarre quand même. Pour en être tout à fait sûr, j’allais sur l’annuaire électronique d’internet. Et alors là, le coup de massue : la société Solido n’existait plus ! Alors, comment, depuis des mois, une de ses représentantes me faisait la promotion de ses portemanteaux ?


A suivre



Notes :



1 : Les hommes qui envisagent de devenir papas devraient manger des noix: une grosse poignée de noix quotidienne permettrait d'améliorer la qualité de leur liquide séminal.

La Fielding School of Public Health a mené une étude auprès de 117 hommes en bonne santé de 21 à 35 ans, en prélevant des échantillons de sperme au démarrage et à la fin de l'étude. La moitié des sujets devait consommer quotidiennement une poignée d'environ 70 grammes de noix, en complément de leur régime alimentaire habituel.

A l'issue des douze semaines de l'étude, la qualité du sperme des mangeurs de noix s'était améliorée, alors que celle du groupe de contrôle n'avait pas évolué. En outre, les mangeurs de noix dont les spermatozoïdes étaient les plus paresseux au démarrage de l'étude ont affiché les progressions de qualité les plus spectaculaires à son issue.


2 : Le système antiblocage des roues, plus connu sous son abréviation allemande ABS (AntiBlockierSystem), est un système d'assistance au freinage utilisé sur les véhicules roulants, empêchant les roues de se bloquer pendant les périodes de freinage intense.



 

 


 
 
posté le 03-05-2021 à 10:26:10

Marina (21).

 

La lévitation: effet mystérieux de la trompette et de l'alcool... 

 

Je n’arrivais pas à établir véritablement des liens entre Marina, Roger, la société de portemanteaux Solido et leur représentante. D’autant plus que cette entreprise, apparemment, n’existait plus.

Alors, quand la nuit arrivait, le sommeil, lui, s’échappait vers des contrées plus que lointaines. L’alcool, alors, insidieusement, rampait vers moi comme un serpent d’un autre temps, immortel et tueur. La musique venait adoucir ses effets, mais pour combien de temps encore ?

J’écoutais alors en boucle Clifford Brown (1) qui interprétait « Laura » à la trompette, pas trop fort, juste un murmure, car la trompette, je ne sais pas pourquoi, semblait me projeter vers le plafond comme si un souffle me maintenait en lévitation (2) instable au-dessus du sol.

 Vers deux heures du matin, quand ma volonté essayait de remonter à la surface, la sonnerie du téléphone me fit atterrir brutalement et à l’autre bout du fil, toujours la même voix qui disait :

« Les portemanteaux Solido, une bonne idée pour un cadeau ! »

Un verre d’eau glacée projetée sur mon visage, voilà ce que représentait pour moi cet appel qui n’avait aucun sens.

« Marina, c’est toi ? » parvenais-je à murmurer, la bouche aussi desséchée que le désert de Gobi (3). Et je m’attendais à ce qu’elle me raccrochât au nez comme l’autre nuit.

Non, pas cette fois ; seul le silence modulé par un souffle lointain semblait suinter de l’écouteur collé à mon oreille droite.

Je répétais ma question :

« Marina, c’est toi ? »

Après un long silence, une voix lointaine répondit :

« Non, c’est Serena ! »

Et la communication fut coupée.

Mais qui était donc cette Serena, qui apparemment travaillait dans la société Solido, qui n’existait plus et qui prospectait à deux heures du matin ?

Alors, émergeant avec peine du labyrinthe limbique (4), une idée parvint à s’immiscer à travers les vapeurs de whisky qui planaient dans mon cerveau :

« Et si la fille qui disait s’appeler Serena n’était autre que Marina qui souffrait d’un dédoublement de la personnalité ? »…

A suivre

Notes :

1 : Clifford Benjamin Brown est un trompettiste de jazz et compositeur américain né à Wilmington dans l’État de Delaware le 30 octobre 1930 et mort lors d'un accident de la route le 26 juin 1956.

 

 

 

2 :Lévitation: Soulèvement d'un corps sans intervention rationnelle d'aucune sorte.

3 :Le désert de Gobi est une vaste région désertique comprise entre le nord de la Chine et le sud de la Mongolie. Il englobe environ un tiers de la surface de la Mongolie. Le bassin désertique est délimité par les montagnes de l'Altai, la steppe de Mongolie, le plateau tibétain et la plaine du nord de la Chine. Le désert de Gobi revêt une importance historique, non seulement pour son appartenance à l'Empire mongol, mais aussi parce qu'il constituait l'un des points de passage de la route de la Soie.

4 : Le système limbique est le nom donné à un groupe de structures du cerveau jouant un rôle très important dans le comportement et en particulier, dans diverses émotions comme l'agressivité, la peur, le plaisir ainsi que la formation de la mémoire. On considère généralement que les principales composantes du système limbique sont les structures subcorticales suivantes :

 

 

 

 

 

hippocampe : impliqué dans la formation de la mémoire à long terme ;

amygdale : impliquée dans l'agressivité et la peur ;

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 
 
posté le 05-05-2021 à 18:17:50

Marina (22).

 

 

 

 

Le lendemain, Marina m’envoya une dizaine de SMS auxquels je ne répondais pas, ce qui, la connaissant, devait l’exaspérer.

Serena me rappela aussi. Je commençais à mieux comprendre la situation. Elle m’avoua qu’elle était en réalité la fille que ma voiture avait renversée un matin dans une rue déserte. Elle avait gardé mon numéro de téléphone qui lui permettait de parler à quelqu’un, lorsque son angoisse était trop forte.

Mais ce qui provoquait son angoisse, ça je ne le savais pas encore.

Marina, quant à elle, me sommait d’aller la voir le plus tôt possible à son labo ou dans sa maison pour me révéler un secret très important.

Lorsqu’elle ouvrit sa porte, je compris vite que quelque chose la tracassait. Moi, j’avais bien une idée derrière la tête, mais je l’oubliais bien vite devant la mine effarée de ma collègue.

Nous nous assîmes face à face, comme pour éviter tout contact physique. Elle était pâle et de son visage avait disparu ce petit sourire coquin qui me faisait tellement craquer. Elle commença une sorte de confession dont l’ignorais la sincérité :

« Tu sais que je suis veuve. Mon époux était le propriétaire de l’entreprise Solido qui fabriquait des portemanteaux. Un jour, l’usine fut complètement détruite par un violent incendie dans lequel, Roger, mon mari, trouva la mort. Dans les sous-sols de l’usine, étaient entreposés un important stock de bois et des réserves de peintures et de solvants inflammables. Ce fut un vrai désastre. On ne retrouva même pas son corps».

Je voyais un peu plus clair dans cette affaire. Marina semblait bouleversée et, après avoir avalé une gorgée d’eau, elle continua.

« On ne sut jamais si ce fut un accident ou un incendie criminel… »

Elle s’arrêta brusquement de parler. Son corps se mit à trembler comme si elle était atteinte de la maladie de Parkinson. Des larmes coulèrent à flot de ses beaux yeux noirs. J’étais un peu indécis quant à l’attitude à adopter. J’allais quand même la rejoindre sur le canapé et je la pris tendrement dans mes bras, comme pour lui transmettre un influx consolateur. L’influx, en fait, circulait en moi dans une région alchimique ou l’argile molle se transformait en or massif et rigide. Pour être plus clair, je dois avouer que j’avais une effroyable érection. J’en avais honte, mais en étais-je responsable ? Qui a la prétention de se faire obéir par ses hormones qui mènent une double vie ? Je craignais seulement, que Marina ne s’en aperçût. Et elle s’en aperçut ! Mais quelle image d’affreux macho, offrais-je à une femme dans la douleur ? Avais-commis l’irréparable ? Je me le demandais, quand elle se détacha brutalement de moi. Elle me contempla avec des yeux où semblaient se fondre toutes les enclumes de l’enfer. Elle cria presque :

« Oh, je te préfère comme ça ! »

Et elle colla sa bouche sur la mienne.

Je fus tellement surpris, que dans la région incontrôlable de mon corps, se produisit le phénomène inverse du précédent : l’or dur, fier et dressé, par un processus alchimique incompréhensible, se transforma en misérable argile aussi molle que les fesses de Josiane Balasko. Sa main droite « tâta » la chose et elle me dit :

« Ne t’inquiète pas chéri, n’oublie pas que je suis une ancienne trayeuse professionnelle ! »

Il suffit de trente secondes pour que je fusse de son avis.

Et l’argile se transforma en or… !

A suivre

 


 
 
posté le 09-05-2021 à 07:49:21

Marina (23).

 

 

 

La nuit fut peuplée d’étoiles. Les murmures, les soupirs et les cris en firent une fête foraine aux stands variés, bariolés et bruyants. Vers deux heures du matin, je sombrai dans le chaudron de barbe-à-papa, dans la ouate rose et parfumée.

Marina s’était endormie avant moi, directement, gluante de nos ébats, sans passer dans la salle de bains. Dans ma somnolence alcoolisée, je l’entendis murmurer plusieurs fois « Roger, Roger »…

Au petit matin, blême comme un café crème, je quittais Marina pour regagner mon domicile, sans rien dire. Elle avait dans le lit, une position qui trahissait un abandon confiant, sans imaginer que dans mon cerveau s’élaborait le scénario d’un film d’épouvante.

Chez moi, la douche effaça de mon corps les odeurs de l’amour et les parfums aux senteurs périmées. Je crus entendre plusieurs fois la sonnerie du téléphone retentir dans mon salon ; Serena tentait certainement, encore de me contacter.

Effectivement, j’étais à peine séché, que le téléphone se mit à bondir sur sa petite table comme un crapaud capricieux. C’était Serena qui oublia cette fois les portemanteaux Solido. Elle voulait absolument que l’on se rencontrât pour me révéler certains faits qui la perturbaient. Je n’avais pas trop envie de la voir et pourtant, c’est elle qui fut mon idée fixe durant des mois, ELLE, que je désirais entendre et aimer. Mais Marina avait comme par hasard, interrompu ce processus amoureux si fort et pourtant si fragile.

Je rencontrais Serena, dans un bar situé dans la rue de l’accident qui faillit lui coûter la vie. C’était le bar des Platanes et mon émotion que je croyais effacée, recommença à vriller mon estomac et à transformer mon cœur en ballon de basket.

Serena, m’attendait, assise au fond du bar, oubliée par la lumière des néons qui ne parvenait pas à l’atteindre. Elle était toujours aussi belle et sexy, dans une jupe courte certainement offerte par Satan lui-même. Elle me regarda comme une naufragée attendant un miracle.

Elle se redressa en appuyant ses mains sur la table ronde et métallique et avança son visage pour m’embrasser, comme on embrasse un ami, sur les deux joues. Je fus agréablement surpris et cela me mit immédiatement à l’aise.

Elle me dit sans préambule :

« Oui, j’ai conservé votre numéro de téléphone et c’était moi, la fille qui vous harcelait au nom des portemanteaux Solido… ! »

Cela, je l’avais deviné sans en comprendre la raison.

Elle continua avec une voix qui ressemblait à un long couloir sombre qui fait peur aux enfants :

« J’étais secrétaire dans les établissements Solido et un jour au cours d’un apéritif de fin d’année, je rencontrais Marina, la femme de mon patron. »

Voilà, c’était le lien qui unissait les deux femmes.

Serena se tut un instant, espérant peut-être que je réagirai d’une manière quelconque.

Elle avait devant elle, une statue de sel immobilisée pour l’éternité. Alors, elle reprit son monologue :

« Nous avons sympathisé et alors Marina me fit une proposition étonnante… »



A suivre


 


 
 
posté le 11-05-2021 à 18:12:51

Marina (24).

 

Serena semblait se décomposer au fur et à mesure de son monologue, sa voix un peu noyée par le bruit des percolateurs, machines à vapeur des temps modernes, qui nous enveloppaient parfois dans un brouillard parfumé d’Arabica de Colombie ou du Pérou.

« Marina me révéla que l’entreprise Solido connaissait d’énormes difficultés de trésorerie et qu’en un mot, elle était au bord de la faillite. Elle me fit comprendre, dans un premier temps, que seules, les assurances, pouvaient la sortir de cette ornière. »

Serena se tut un instant, les yeux perdus dans un monde à elle, celui que les circonstances d’une rencontre improbable, avaient créé. Mais avec courage, elle continua :

« Moi, je ne comprenais pas très bien où elle voulait en venir. Alors Marina fut plus explicite et me dit qu’un incendie de l’usine Solido serait le bienvenu pour être dédommagé par les assurances. »

Mon attention, un instant détournée sur les seins de Serena que j’imaginais plutôt en forme de poires Guyot bien fermes, replongea dans l’acide chlorhydrique, ce scénario effroyable dont je commençais à découvrir les conséquences.

Serena continua avec une voix qui essayait de survivre parmi les cris et les rires d’ouvriers attablés près de nous.

« C’est alors que Marina me proposa une forte somme d’argent si je pouvais l’aider. Oui, l’aider à incendier les usines Solido. Cela se ferait tôt le matin, quand les ateliers étaient déserts. Les sous-sols contenaient du bois et d’énormes quantités de solvants divers très inflammables. Il suffirait d’une allumette jetée sur les futs suintants de vapeurs pour provoquer un important incendie. Moi j’étais étudiante et j’avais besoin d’argent. J’avais trouvé une place de secrétaire intérimaire à temps partiel dans cette entreprise qui me permettait tout juste de payer le loyer de mon studio et mes maigres repas au resto U. J’ai donc accepté la proposition de Marina, à la seule condition que les entrepôts soient absolument déserts. »

Je me demandais ce qui poussait Serena à se confier ainsi à moi, un inconnu, à avouer finalement un acte criminel. Les remords peut-être ?

Le silence se fit soudain dans le bar, quand les ouvriers sortirent pour aller travailler. Serena baissa un peu la voix pour me raconter la suite.

« Avec Marina, on fixa la date et l’heure de l’incendie. Elle me donna la moitié de la somme prévue et me promit le reste quand cette affaire serait terminée. Mais le jour de l’incendie, tout ne se passa pas comme prévu… »

 

A suivre

 

 

 


 
 
posté le 14-05-2021 à 13:38:29

Marina (25).

 

 

Serena poursuivit sa confession :

« Un jour, Marina me téléphona pour que l’on se rencontrât dans un bar. Là, elle me donna le double des clés de l’entreprise Solido. Son mari avait une angine et serait absent pendant quelques jours. C’était le moment d’agir, tôt le matin, quand les employés n’étaient pas encore arrivés. Il fallait que les locaux fussent absolument déserts pour éviter tout drame humain. »

Serena se figea soudain, certainement bouleversée par une charge émotionnelle longtemps refoulée. Sans réfléchir, je pris sa main dans la mienne. Elle se laissa faire avec un petit sourire reconnaissant :

« Le jour J, vers sept heures du matin, j’entrais dans l’entreprise déserte et j’allais directement au sous-sol que je connaissais bien. Là, j’enflammais un morceau de chiffon qui dépassait du goulot d’une bouteille en plastique remplie d’essence que je plaçais tout près des fûts pleins de solvants. J’avais tout apporté dans un sac en papier. Je savais que l’air était saturé de vapeurs inflammables et que l’incendie allait se déclarer en quelques minutes. J’eus tout juste le temps de quitter l’entreprise. Une énorme explosion secoua tout le quartier endormi. Je pris le bus à une station voisine pour m’éloigner le plus vite possible du lieu du sinistre. J’allais ainsi jusqu’au terminus situé à plusieurs kilomètres de distance et qui se trouvait dans une rue que je ne connaissais pas. J’étais bouleversée. C’est dans cette rue que votre voiture m’a renversée. Ce n’était pas votre faute ; je me comportais alors comme un zombie qui marchait dans un brouillard épais. »

Des larmes coulaient maintenant des yeux de Serena. J’étais un peu gêné pour elle, car le serveur nous observait de loin. Il frottait avec un torchon, le zinc du comptoir qui brillait sous la lumière froide des néons qu’il avait oubliés d’éteindre. Je ne savais pas comment consoler et rassurer autant que possible, cette jolie fille qui m’avait fait rêver pendant des jours et des jours. Discrètement, Serena essuya ses yeux avec un mouchoir en papier qu’elle roula en boule ensuite, pour le cacher dans son sac. Et elle continua son histoire :

« Le lendemain, par le journal local, j’appris que l’entreprise Solido avait complètement brûlé et qu’une enquête de routine avait été déclenchée. »

J’essayais de dédramatiser la situation :

« Mais Serena, tout est fini, maintenant. Il faut tout oublier et passer à autre chose ! »

Serena me jeta un regard tentaculaire :

« Oublier ? Comment oublier tout ça, alors que je suis une criminelle ! »…

A suivre

 


 


 
 
posté le 15-05-2021 à 19:00:34

Marina (26).

 

  

Méfions-nous des confidences... 

 

Elle répéta sa phrase, pour se faire du mal peut-être ou pour tenter d’expier cette action fatale.

« Oui, je suis une criminelle ! »

Le bar semblait en rodage. Il prenait l’aspect d’un garage désaffecté avec ses tables désertées et ce parfum de café qui planait comme cette odeur de vieille huile qui encombre l’atmosphère des arrière-cours où s’entassent les voitures en fin de vie.

Moi, je ne savais quoi dire, gagné par son émotion ; je ne pouvais que la regarder, fixer ses yeux embués, témoins du drame qu’elle avait vécu.

Et Serena se remit à raconter :

« Marina me téléphona le surlendemain pour m’apprendre que son mari avait péri dans l’incendie. Un incendie si violent, qu’on ne retrouva pas son corps. Marina m’expliqua que Roger, malgré son angine, était allé travailler très tôt ce matin-là, comme il en avait l’habitude. »

Un jeune homme entra dans le bar. Il avait les yeux troubles de quelqu’un qui avait fumé un joint. J’avais appris à repérer les élèves de troisième qui se droguaient. Du jour au lendemain, leur comportement changeait : ils se montraient agressifs et leurs yeux rougis ne laissaient aucun doute quant à leur addiction. Leurs parents ne remarquaient rien et étaient catastrophés quand on essayait de les avertir. Souvent ils niaient l’évidence et attribuaient les yeux rougis de leurs enfants à une conjonctivite saisonnière. Des parents-autruches, on  en a vu des dizaines, des parents qui ne voulaient surtout pas que l’on dérange leur petite vie bien huilée.

Le jeune homme au blouson de cuir se dirigea vers le juke-box et lança une chanson de Grand corps malade « J’ai oublié ».                             

L’oubli, c’est certainement ce qu’il fallait à Serena pour qu’elle reprenne le dessus. Je lui demandai si le jour de l’incendie, elle n’avait pas observé des indices troublants. Elle me regarda comme si elle scrutait un totem et dans ses yeux passa un éclair dont l’intensité sécha un instant ses larmes. Elle me répondit :

« Oui, je me souviens que tout était éteint dans l’entreprise et que le bureau du patron était parfaitement obscur. »

Alors je lui assenai une question qui la déstabilisa.

« Et alors, qu’est-ce qui prouve que votre patron était dans l’usine ce jour-là ? »

Elle mit du temps à réagir, comme si ma phrase venait déranger le scénario funeste qui empoisonnait sa vie depuis des jours et des mois. Elle ne put que me répondre :

« Mais c’est sa femme, Marina, qui me l’a dit ! »

Malgré moi, je lui fis un petit sourire, comme un baume calmant sur une brûlure qui suinte et je lui murmurai :

« Et si Marina avait menti ? »…

 

                                                                                  A suivre

 

 


 
 
posté le 17-05-2021 à 13:30:00

Marina (27).

 

 


 Serena me berça avec son sourire, petit éclair sympathique dans ce bar plein d’odeurs de café, de bruits de machine à vapeur que le percolateur fatigué, coureur de fond essoufflé, projetait dans la salle en étouffant les conversations des rares clients qui passaient.

Elle ne pensait pas que Marina eût menti et elle poursuivit sa confession :

« Après l’incendie, j’ai vécu l’enfer ! Je n’arrivais plus à sortir, je restais des jours entiers enfermée chez moi et je ne répondais plus aux sollicitations de mes amis. Un jour, presqu’au bord du suicide, je trouvai dans la poche de mon manteau, un morceau de papier sur lequel vous aviez écrit votre numéro de téléphone et ce fut une bouée que le destin me lançait. Je m’y accrochais comme une désespérée et c’est alors que je commençais à vous téléphoner au nom de la société Solido. Cela me permettait de parler à quelqu’un et je m’efforçais de ne pas vous appeler plusieurs fois par jour. Je ne vivais que pour ça : vous parler quelques minutes anonymement. »

Je l’interrompis pour lui dire :

« Et moi j’attendais votre appel, sans savoir que c’était vous ! C’était un drôle de lien qui s’était créé entre nous ; chacun avait besoin de l’autre ».

Ma main serra la sienne et ce fut avec ELLE, mon premier instant de bonheur. Je tentais de lui expliquer ce que je pensais de sa situation :

« J’ai des indices confus qui me font croire que Marina vous a bien menti et que son mari n’a pas péri dans l’incendie de son entreprise. »

Serena m’enveloppa d’un regard diffus, mélange d’espoir et d’incompréhension. Elle me murmura :

« Alors Roger est encore vivant ? Marina et lui ont donc monté ce stratagème pour toucher la prime d’assurance ? »

Je dus rectifier sa pensée :

« Non, je pense que Roger est bien mort ! »

Son regard me caressa la joue et ses yeux se perdirent dans un labyrinthe obscur que j’aurais bien aimé explorer avec elle, en lui tenant la main, en sentant sa peau sur la mienne…

« Votre patron est bien mort, mais pas comme vous l’aviez imaginé…! » 


A suivre


 


 
 
posté le 27-05-2021 à 08:40:56

Marina (28).

 

 

 

Roger, le squelette du labo de SVT... 

 

Quelques jours plus tard, je reçus un appel de Marina qui me demandait d’aller la voir au collège. Je pensais qu’elle avait encore besoin de mon sperme bio pour montrer aux élèves la valse de mes spermatozoïdes musclés sous l’oculaire des microscopes. J’étais prêt à satisfaire sa requête à condition que mon émission spermatique fût recueillie dans sa bouche.

On se rencontra, comme d’habitude, dans son labo et je m’aperçus que ses muscles buccaux n’avaient rien perdu de leur vigueur. Elle recracha le tout dans un bécher de 50 mL, qui fut rempli presqu’à ras-bord (j’exagère bien-sûr, car je ne suis pas un cheval). Ce qui me gênait surtout, c’était la présence constante de Roger qui assistait à tous nos ébats. Roger, c’était le squelette du labo et sa tête de mort-vivant curieux me donnait des frissons qui n’avaient rien à voir avec ceux que me fournissait la bouche de Marina. Après avoir fini de tripoter ses gros seins, j’osais enfin lui demander :

« Mais pourquoi as-tu surnommé Roger, le squelette du labo ? »

Marina se figea et prit sur la paillasse un bistouri inquiétant. Elle se dirigea vers moi, comme si elle voulait me poignarder. Elle arrêta la lame à deux centimètres de ma gorge et se mit à rire d’une manière hystérique.

« Tu as eu peur, hein ? » me dit-elle.

Moi, je me demandai surtout ce que je faisais dans cette pièce. Je lui reposais la question sur le prénom du squelette à laquelle elle ne répondit pas, se contentant de passer sa langue gluante sur mes lèvres.

Elle alla ensuite dans sa salle qui communiquait avec le labo, en me disant qu’elle devait préparer des travaux pratiques pour sa classe de 3ème.

J’en profitais pour fouiller dans une armoire, cherchant un indice qui pourrait effacer la brume qui encombrait mon cerveau. Je trouvais un classeur dans lequel elle conservait tous les bons de commandes des différents matériels et produits chimiques nécessaires aux expériences réalisées en SVT. Quelque chose de bizarre attira mon attention : en trois ans, elle avait commandé, par petites quantités, plus de cent litres de soude.

Je me souvins alors que j’avais lu un article dans lequel on expliquait comment on «fabriquait » les squelettes à partir de cadavres : par dissolution des chairs par la soude. Un frisson peu voluptueux parcouru ma moelle épinière, lorsque je me retournais pour observer Roger, le squelette suspendu à une potence métallique. Roger, au sourire énigmatique figé pour l’éternité.

Avec horreur, je crus comprendre ce qui était vraiment arrivé…


A suivre


 

 


 
 
posté le 27-05-2021 à 08:45:48

Marina (29).

 

 

Vive l' ADN

ou

Acide DésoxyriboNucléique

(c'est plus facile à dire) 

 

De toute évidence, Roger n’était autre que le squelette du mari de Marina. Par conséquent, il n’avait pas trouvé la mort dans l’incendie de son usine de portemanteaux. Il était décédé ailleurs et probablement assassiné par sa femme. On ne retrouva pas le cadavre sur le lieu du drame, car en fait il était certainement resté à son domicile. Marina avait dû tuer son mari et pour se débarrasser de son corps, elle l’avait fait dissoudre dans de la soude, probablement dans sa baignoire. Elle avait dû reconstituer le squelette, pour le transporter ensuite dans son labo, au collège.

Quelle cruelle vengeance ! Le mari de Marina, assistait, par l’intermédiaire de son squelette, à tous les ébats amoureux de son épouse. Et elles étaient nombreuses ses parties de « jambes en l’air »...

Il fallait d’abord que je fusse sûr que le squelette du labo était celui de Roger, le mari de Marina. Seul un test ADN pouvait le prouver. Avec le scalpel que je trouvai sur la paillasse, je grattais le tibia de ce pauvre Roger. Je recueillis la poussière d’os sur un morceau de papier filtre. Quand j’en eus une quantité suffisante, je pliais le papier en quatre et le plaçai dans la poche de ma veste. Ouf, c’est à ce moment-là que Marina revint dans le labo, en me disant :

« Chéri, il faut que tu files, les élèves vont arriver ! »

Ce « chéri » me fit froid dans le dos. Elle me poussa dehors, après m’avoir embrassé sur la bouche et titillé ma langue avec la sienne chaude et baveuse.

Mais que faire de cette poussière d’os ? L’apporter à la police ? Et si je m’étais trompé ? Je ne pouvais pas accuser quelqu’un sans de réelles preuves. J’avais un ami qui travaillait à l’une des facultés des sciences de Marseille ; lui, pouvait certainement savoir à qui s’adresser pour effectuer le test ADN.

Chez moi, je lui téléphonais et il fut heureux d’évoquer les frasques de notre jeunesse. Cependant, je lui racontais toute l’histoire de Marina et les craintes que je nourrissais à son sujet. Il me refroidit un peu en me disant :

« Oui, mais il me faudrait un élément de ton Roger vivant, comme des cheveux, de la salive, du sang, du sperme…, pour que l’on puisse comparer les deux ADN. »

Où allais-je trouver tout ça ?

Presqu’avec effroi, je compris que je devrai aller faire un tour dans la maison de Marina. Il fallait que je jouasse avec elle, la comédie du collègue amoureux. Je lui laissais un message sur son portable, presqu’une déclaration d’amour à laquelle, je pensais, elle ne serait pas insensible. Elle me répondit, quelques minutes plus tard, en me disant qu’elle m’attendrait, le soir même chez elle, vers vingt heures et que j’avais intérêt à «assurer».

Le sort était jeté : je craignais surtout que le labo ne s’enrichît d’un deuxième squelette prénommé « Virgile » (mon prénom)…


A suivre

 

 


 
 
posté le 27-05-2021 à 08:49:18

Marina (30).

 

 

 

 

 Marina et moi version soft...

 

J’avais donc prélevé de la poussière d’os sur le tibia de Roger, le squelette, qui se trouvait dans le labo de Marina. Mais pour savoir, par un test ADN, si c’était bien celui de son mari, je devais chercher des indices lui ayant appartenu de son vivant.

Je me pointais, peu rassuré, chez Marina vers vingt heures. Décidément, de jour en jour je découvrais des facettes peu rassurantes de sa personnalité. Je savais qu’elle était érotomane et certainement aussi nymphomane et manipulatrice, mais je pensais à présent, qu’elle était, en plus, criminelle. Sa maison devenait pour moi, inquiet professionnel, un lieu hautement improbable.

Quand elle ouvrit sa porte, j’oubliai, un instant, que j’avais affaire à une dangereuse psychotique ; je la trouvais belle et sexy et déjà je salivais en pensant à la nuit que j’allais passer avec elle. Elle m’accueillit avec un baiser sur la bouche, un de ces baisers plus chaud que l’Etna, avec une langue aussi agile que les sabres des soldats napoléoniens. Elle savait provoquer en moi, une tension palpable aussi dure que du vieux bronze chinois et mettre en marche la machine qui fabriquait ma lave bouillonnante et prête à jaillir. Bref, elle me « tenait » par le sexe !

Elle était assise à côté de moi, sur le canapé, et sa belle cuisse découverte me transmettait déjà la chaleur de son corps. J’en perdais mes repères et j’oubliais alors ma « mission » et ses dangers. Elle me proposa un apéritif, whisky, pastis ou martini. Je choisis le moins fort pour garder des neurones à peu-près présentables. Sur la petite table basse en verre, en face de nous, elle avait garni des petites assiettes avec des soufflés à la cacahouète, des noix de cajou et des crackers au fromage. Tout ce que j’aimais ! Mais derrière mes sourires de façade, je cherchais où je pourrais trouver, dans cette maison, des traces biologiques de Roger. Cela ne m’empêchait pas de faire voltiger ma main un peu partout sur son corps. Elle se laissait faire, en gloussant comme une nymphe timide. Entre deux gorgées d’apéritif et deux crackers Belin, elle m’avoua que pour oublier le drame, elle avait jeté toutes les affaires de Roger et même ses lettres d’amour. Les pistes s’effilochaient une à une : la salive sur les enveloppes, les cheveux sur les vêtements…etc.

Je me demandais alors si cette soirée était vraiment une bonne idée. Un peu quand même, oui, car sa main avait commencé un travail minutieux sur mon archet si sensible qui n’attendait que cela : frotter les cordes du violon de Marina… Un violon qui chuintait des mélodies peu catholiques à ne pas faire écouter à des oreilles chastes. Par un hasard, programmé par le destin, Marina caressa mon visage et s’exclama :

« Oh, tu ne t’es pas rasé ! Je déteste ça ! »

C’est vrai que j’avais une petite barbe de deux jours qui se voyait à peine. Mais Marina, têtue comme une mule ménopausée, ne voulut plus continuer nos petits jeux coquins.

« Il faut te raser ! » me dit-elle avec un air dégoûté .

Une lubie de plus à ajouter aux exigences de Marina qui en avait déjà beaucoup. Ma libido commençait à prendre l’aspect d’une glace à la vanille qui fondait au soleil et mon archet acquérait la mollesse des élastiques en caoutchouc des îles. Je trouvais là une occasion de fuir :

« Bon, puisque tu l’exiges, je retourne chez moi pour me raser ! Je reviendrai dans une heure si tu le souhaites. »

Marina répondit :

« Idiot, tu n’as qu’à aller dans la salle de bains et te raser avec le rasoir électrique de Roger que j’ai gardé en souvenir ! »

Marina ne se doutait pas qu’elle venait de commettre une erreur fondamentale…


A suivre


 


 
 
 

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